All of us are dead : l’apocalypse zombie comme initiation de la jeunesse

affiche série all of us are dead

Ah le zombie coréen, ses soubresauts, sa vélocité, ses claquements de dents, ses stigmates spécifiques, cette délicate carnation tirant sur le gris-vert strié de rouge sang : tout un poème de violence métaphysique et d’esthétique gore ! Au pays du matin calme, le mort vivant est le signe indubitable que le système se casse la gueule. C’était valable pour Dernier train pour Busan, Kingdom 1 & 2. La série All of us are dead respecte aussi cette règle à la lettre avec un peu plus de brutalité, de sauvagerie et un message alarmiste sur notre futur. Explications.

Cauchemar apocalyptique

All of us are dead : le titre annonce la couleur. Nous sommes tous morts. Physiquement, mentalement, socialement. C’est du moins la morale pas forcément agréable que plusieurs élèves du lycée Hyosan vont tirer de leurs traumatisantes mésaventures en terre zombie. Un schéma classique, dirais-je : un savant fou, une souris contaminée par un virus, une élève qui se fait mordre, et c’est la merde intégrale sur le campus, où l’épidémie se répand à toute vitesse. En une matinée, c’est plié ; la vie bien réglée de cet établissement modèle vire au cauchemar apocalyptique.

Seuls quelques gamins échappent aux fatidiques morsures, se repliant comme ils peuvent dans des salles de classe, des réduits, sur les bibliothèques, dans un gymnase, sur le toit… L’effet de sidération passé, il faut s’organiser en attendant des secours qui ne viennent pas. Nos petits loulous vont donc devoir grandir très vite, prendre des décisions par eux-mêmes, en évitant de se bouffer le nez comme des ados qu’ils ne vont plus pouvoir être encore très longtemps s’ils veulent survivre. Il va falloir se faire violence car la très élitiste société coréenne ne les a pas préparés à ça.

Dernier train pour Busan : zombis à la coréenne et allégorie d’une société en ruines ?

Zombie vs déterminisme social

Adaptée du webtoon Now at our shcool de Joo Dong Keun, la série de Cheon Seong-Il respecte à la lettre le principe édicté par Romero : symptôme d’une société profondément malade qui court à sa perte, le zombie constitue un mégaphone d’une rare puissance. En douze épisodes d’une cinquantaine de minutes chacun, All of us are dead dénonce un système scolaire d’une rare dureté, où la compétition est féroce, les critères de sélection ignobles, le harcèlement quotidien. Cet univers pédagogique sert d’usine de formatage en accentuant les inégalités et l’individualisme.

L’épidémie zombie rebat les cartes de ce déterminisme social en positionnant les valeurs d’entraide, d’amour, de sincérité au centre de cette lutte pour la vie. Le fait que les adultes s’avèrent pour la plupart impuissants face à la catastrophe en dit long sur l’urgence de laisser les jeunes générations se réinventer sur des bases plus saines. Pour le coup, nos petits héros malgré eux vont être obligés d’appliquer hard et soft skills in real life, en intégrant le traumatisme de la séparation, du deuil vitesse grand V.

Tout, tout, tout, vous saurez tout sur les ZOMBIES !

Et nos jeunes dans tout ça ?

All of us are dead est-il une série d’ados ? Certaines longueurs, certains dialogues un peu mièvres, certains gags le laisseraient penser. Pourtant, cette fable secoue le public bien plus qu’il ne voudrait le reconnaître. Comment ne pas évoquer l’épisode pandémique que nous traversons actuellement avec son lot de confinements, la quête acharnée et infructueuse de la source virale, les efforts désespérés pour trouver un remède ? Et nos jeunes dans tout ça, que deviennent-ils ? Sacrifiés par des autorités obligées de faire des choix pour sauvegarder ce qui peut encore l’être.

Nos héros ne pourront compter que sur eux-mêmes pour s’en sortir… et pour conserver les enseignements qu’ils ont tirés de cette initiation. Bien sûr, le cliffhanger final est propice à une seconde saison, déjà en chantier. Mais le premier chapitre de cette histoire, qui évoque à la fois Battle royal et Squid game, est déjà lourd de signification : une société qui ignore sa jeunesse, l’enferme dans des valeurs d’égoïsme et de matérialisme aveugle, se condamne irrémédiablement à la mort. All of us are dead, à moins d’une prise de conscience ?

Et plus si affinités

Vous pouvez visionner la série All of us are dead sur Netflix.

Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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