Et si l’art n’aimait pas les vacances ?

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une jeune fille devant un monument en été

On prétend qu’il n’y a pas de saison pour l’art. C’est faux. L’été — avec ses shorts froissés, ses moiteurs désœuvrées et ses cocktails tièdes — est sans conteste la pire période pour la création. Non pas que l’art disparaisse : il se travestit. Il se plie, se vend, se déguise. Pour plaire, pour détendre, pour ne surtout pas déranger. Mais au fond… et si l’art, le vrai, n’aimait tout simplement pas les vacances ?

Quand l’art devient décoratif

Les expositions estivales s’affichent dans les magazines de plage, entre une recette de gaspacho et un horoscope à usage unique. On y vante des accrochages “joyeux”, des “parcours accessibles”, des “expériences immersives”. Comprenez : des œuvres sans aspérités, sans aspersion, sans aspiration ?

En été, l’art devient une activité comme une autre, un item sur une to-do list touristique. On le consomme comme une glace, vite fondue, aussitôt oubliée. Il n’interroge plus, il orne.
Or, l’art n’est pas un parasol. Il est un orage.

Tourisme culturel ou simulacre de contemplation ?

Ne nous leurrons pas : le “tourisme culturel” est une industrie. On réserve des “pass musée”, des “visites nocturnes”, des “parcours ludiques”. Il faut cocher, photographier, partager. Peu importe ce qu’on a vu, tant qu’on peut le dire.

Et pourtant, qui prend le temps de rester devant un tableau ? Qui s’attarde devant une installation ? Qui ressort troublé d’une performance ? L’été impose un rythme : rapide, léger, consensuel. L’art se fait concédé, non plus exigeant. Il perd sa part d’ombre.

La démission estivale des corps et des esprits

On parle beaucoup de “corps au repos”, mais durant la période des vacances, ce sont surtout les esprits qui se débranchent. L’été veut du doux, du beau, du bienveillant. Toute violence esthétique est jugée déplacée. Toute pensée complexe, inconvenante.

Pourtant, c’est précisément dans les moments de relâchement que l’art devrait piquer.
Il ne s’agit pas d’imposer l’austérité, mais de préserver la densité, la résistance, la dissonance. Et de profiter de la détente des esprits pour susciter le questionnement, la réflexion.

L’art, ce travailleur sans congés

L’artiste, lui, ne prend pas de vacances. Il observe, il note, il travaille, même au bord de l’eau.
Certains festivals s’en souviennent (Avignon, Arles, Sète…), mais nombreux sont ceux qui cèdent à la tentation de la facilité : effets spéciaux, scénographie gadget, slogans édulcorés.

Or, l’art n’est pas un moment d’évasion. C’est une friction. Il ne nous fait pas fuir le monde, il nous y ramène, parfois brutalement, au moment où on s’y attend le moins, quand on voudrait surtout ne plus voir le quotidien et ses horreurs.

Pour une exigence artistique hors saison ?

Et si nous inventions un été non pas culturel, mais cultivé ?
Un été où l’art ne serait pas un divertissement, mais une mise à l’épreuve, une rencontre, une tension fertile ?

Loin des plages bondées et des audioguides monotones, il est temps de rendre à l’art son droit au sérieux, même en vacances. Quitte à transpirer un peu dans les galeries vides.

Et plus si affinités ?

Vous avez des envies de culture ? Cet article vous a plu ?

Dauphine De Cambre

Posted by Dauphine De Cambre

Grande amatrice de haute couture, de design, de décoration, Dauphine de Cambre est notre fashionista attitrée, notre experte en lifestyle, beaux objets, gastronomie. Elle aime chasser les tendances, détecter les jeunes créateurs. Elle ne jure que par JPG, Dior et Léonard.