L’Effondrement : « this is the end »

Mais quelle mouche a piqué Canal + ? Après le très apocalyptique Guerre des monde, voici que la chaîne à péage porte L’Effondrement sur les fonds baptismaux. Une mini série qui nous parle direct et sans pitié … de collapsologie, soit selon Wikipedia, « l’étude de l’effondrement de la civilisation industrielle et de ce qui pourrait lui succéder ».

Dissolution et uppercut

Le tout en huit épisodes uppercut de 20 minutes chacun, qui illustrent les étapes nous menant au chaos. La dissolution de notre société, de notre mode de vie. Huit épisodes où tout s’arrête, étape par étape. Approvisionnement, électricité, transports, réseaux de communication … tout stoppe. Plus d’argent, plus d’essence, plus de lumière, plus de nourriture … alors il faut survivre. En fuyant, en s’épaulant, en s’entre tuant.

Personnes émotives s’abstenir. Même les plus accrochés risquent fort d’y laisser le peu de confiance qu’il leur reste dans un avenir bien assombri déjà par une actualité fort menaçante. C’est que le scénario de Guillaume Desjardins, Jérémy Bernard et Bastien Ughetto est à la fois vraisemblable et crédible. Pour ne pas dire déjà amorcé ? Regardez les JT, scrollez le fil Twitter …

Vraisemblable et crédible

La pénurie de carburant, les coupures d’électricité, la misère qui frappe, la précarisation des individus … la série engendrée par le collectif Les parasites et Et Bim Distribution, nous parle de tout ça, puissance 1000. Quand tout aura basculé. Que les riches se seront réfugiés dans des îles privatisées sous haute sécurité, que ceux qui n’ont rien devront dépouiller ceux qui ont encore moins.

Une fiction de plus ? Aujourd’hui le marché de la sécurité investit dans ce secteur de l’exfiltration, avec comme levier la peur de la crise climatique, des émeutes, des épidémies, du crash financier et économique … Et L’Effondrement nous l’explique avec autant de dynamisme que de lucidité, sans verser jamais dans le spectaculaire hollywoodien.

Des gens comme vous et moi

Ici pas de zombis, de cannibales, de dingos à la Mad Max, de pestiférés … juste des gens comme vous et moi, avec des amis, des familles, des enfants, qui tentent de se sortir d’une situation épouvantable comme ils peuvent, quitte à jouer les gros bras, à devenir des loups dévorant les agneaux car « la raison du plus fort est toujours la meilleure ».

La Fontaine aurait-il aimé ce récit court, dont chaque chapitre précipite l’humanité un peu plus bas en vingt minutes chrono chacun ? La bonté, rare, des uns, l’avidité, partagée, des autres ? L’instinct de survie mêlé à la folie furieuse, les principes qui partent en fumée … mais en avait-on avant, finalement ?

Un révélateur des caractères

Et l’effondrement devient alors un révélateur des caractères, qui, acculés, ne se cachent plus derrière les masques de l’hypocrisie sociale. C’est d’autant plus poignant et intolérable que jamais on ne sait ce qui a déclenché ce chaos. On comprend juste que cela aurait pu être évité, si on avait été moins rapace.

Prise de conscience brutale, dans l’urgence de la fuite … Ici le casting appuie de tout son poids, servi par des pointures comme Audrey Fleurot, Thibault de Montalembert, Philippe Rebbot ou Catherine Salviat. Les interprètes de cette course vers nulle part insufflent avec finesse et acuité cette incompréhension, cette panique, cette perte irrémédiable des repères …

Que dire de plus sinon que cette série doit être vue, quitte à y laisser ses illusions, non comme un divertissement, un feuilleton de plus dans un marché ultra saturé de l’évasion, mais comme un avertissement, nécessaire, une question impérieuse : quand ce temps sera venu, serons-nous prêts ?

Et plus si affinités

https://www.canalplus.com/series/l-effondrement/h/12670812_50001

Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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