La septième fonction du langage – Laurent Binet : Tout fait signe …

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L’irrésistible thriller de Laurent Binet La septième fonction du langage sort enfin en poche et il y a fort à parier qu’il va se classer en tête des ventes. Mais d’ailleurs est-ce un thriller que ce subtil livre sur le pouvoir du romanesque, des mots, de la langue ? A lire d’urgence !

Tout commence par un banal et tragique accident de la route : Roland Barthes, éminent sémiologue, traverse distraitement un passage clouté et se fait renverser. Quelques jours plus tard, il en décède. Panique et émoi dans le si ouaté monde germano-pratin : philosophes, journalistes et romanciers défilent à l’hosto et au cimetière, la larme à l’œil, alors que politiques et intellectuels soupçonnent déjà un assassinat.

A raison. Barthes possédait un document complétant les six fonctions du langage définies par le linguiste Roman Jakobson avec les pouvoirs de la méconnue « 7ème fonction du langage », celle capable de retourner le cerveau de tout un auditoire, de le rendre acquis à votre cause en 2 phrases, 3 mouvements. Dès lors, une enquête est diligentée par Valery Giscard D’Estaing, embarquant le commissaire Bayard et un jeune professeur de faculté – Simon Herzog – dans des péripéties aussi rocambolesques que hilarantes.

Prix Interralié 2015, Laurent Binet signe avec La septième fonction du langage un remarquable roman, lui qui avait déjà marqué les lecteurs avec HHhH et Rien ne se passe comme prévu. La peinture des frémissantes années 80 où s’échafaude la Présidentielle de 1981 et celle de l’imbitable gratin de la « French Theory » (Michel Foucault, Gilles Deleuze, Jacques Derrida, Hélène Cixous, Julia Kristeva, Bernard-Henri Levy, Umberto Eco ou encore Philippe Sollers) pourraient en faire un solide roman socio-historique… mais ce serait oublier les courses-poursuites et une traque au long cours qui vous mène de backrooms (où de dociles rebeus sucent Foucault) à des colloques américains pour experts-linguistes.

Ce serait aussi faire l’impasse sur ces nombreuses pages qui vous expliquent les rudiments de la sémiologie ou encore cette querelle Derrida/Searle autour de la théorie des actes du langage. Le tout sans être rébarbatif : une gageure. La septième fonction du langage fait donc feu de tous les genres avec un humour et un sens du rythme ravageurs. Sollers a moyennement goûté le roman (vous comprendrez pourquoi à la lecture de l’œuvre …). Qu’en ont pensé Jack Lang, BHL et tout ces universitaires relous des années 70/80 ? Réflexion sur « le pouvoir du langage » et de sa dimension politique, roman populaire, roman pop, livre savant », ébouriffant en tout point, La septième fonction du langage est en tout cas un vrai plaisir de lecture dont il serait dommage de faire l’impasse.

Et plus si affinités

http://www.livredepoche.com/la-septieme-fonction-du-langage-laurent-binet-9782253066248

Cédric Chaory

Posted by Cédric Chaory

Attaché de presse de son état, Cédric Chaory est un fin connaisseur de l'industrie du spectacle, par ailleurs danseur et passionné de théâtre. Quand il ne nous parle pas de chorégraphie, il chronique des expositions ou des livres qu'il a aimés.

Website: http://cedricchaorycommunication.fr/