
Companion : un revenge porn de plus ? Oui et non des moindres. Mêlant les ambiances de Revenge et de Murderbot avec une bonne grosse touche de Black Mirror, le film de Drew Hancock se veut une comédie qui vire au glauque. Non en fait, le glauque est là dès les premières images, et ce n’est pas un hasard.
Objet sexuel et arme du crime
Tout commence avec la déclaration d’amour d’Iris. Mignonne frimousse, maquillage parfait, sourire angélique, mains souillées de sang. Iris (Sophie Thatcher) vient de buter l’homme de sa vie. Qui est aussi son propriétaire, mais ça elle ne le sait pas. Car Iris n’est pas une femme mais un companion robot loué à la firme Empathix par Josh (Jack Quaid), mec moyen en mal d’amour et de nana soumise cadrant parfaitement avec ses fantasmes. Iris est la candidate rêvée, facilement pilotable depuis une smartphone via une appli : intelligence, émotions, obéissance, tout se gère depuis l’écran.
Et le spectateur va très vite le comprendre. Où est alors le problème ? Eh bien, outre que Josh, comme nombre de ses confrères, considère Iris comme un objet sexuel corvéable à merci doublé d’une femme à asservir et manipuler à loisir en fonction des humeurs du jour, Iris, sans le savoir, est l’arme idéale pour commettre un meurtre. C’est ce qu’elle va découvrir durant le petit week-end que Josh a organisé avec des amis chez Serguey, riche oligarque russe. Et cela va la faire vriller. Gravement.
Décocher la case « consentement »
Je n’en dis pas plus sur l’histoire. Ce qui me reste en tête, c’est le sentiment de malaise et de révolte qui me saisit en voyant Iris se débattre avec des sentiments et des émotions qu’on lui a implantés volontairement dans les circuits : une forme ultra invasive d’emprise logicielle absolument insupportable. Le film met ainsi à nu un imaginaire industriel malsain où n’importe quel dingue peut louer un corps pour la compagnie, le sexe, le service — et où il suffit de décocher la case « consentement » d’un mouvement de pouce pour faire à peu près ce qu’on veut, y compris tuer.
De fait, la relation Josh/Iris n’en est pas une : c’est un contrat d’exploitation maquillé en romance. Dans Murderbot, l’IA se dérobe par le sarcasme ; dans Companion, Iris n’a pas d’issue — on peut la mettre en veille quand sa détresse dérange. C’est glaçant car cela va pousser la belle aux pires extrémités. Et la métamorphoser en justicière féministe qui fait le ménage chez ces masculinistes à la petite semaine afin de conquérir sa liberté.
Dénoncer la culture du contrôle
Le parallèle avec Murderbot encore s’impose : Iris est « jailbreakée » pour tuer un salaud certes, mais avec l’idée derrière de lui piquer son pognon. L’abus d’un humain la transforme en arme : dans ce système d’oppression techno-économique, l’homme est le premier prédateur, qui détourne un outil fourni par une méga-corpo dans une illusion de toute-puissance qui va lui péter à la tronche. La violence par délégation, version 2.0, qui revient en pleine face comme un boomerang.
Horreur technologique, charge féministe. Visuellement, le film confond comédie noire et traque violente, pour dénoncer la culture du contrôle — du corps des femmes, des travailleurs, des IA. Murderbot refusait le script ; Iris apprend à le saboter. Et c’est là que le film mord : la dignité ne se met pas en veille. Jamais.
Et plus si affinités ?
Vous avez des envies de culture ? Cet article vous a plu ?
Vous désirez soutenir l’action de The ARTchemists ?