The Great : Petite Catherine deviendra Grande

Ah The Great! Mon Dieu, quel bonheur que cette série qui déboule sur Hulu et Starzplay pour nous balancer un grand bol d’air frais en pleine tête. The Great, soit dix épisodes échevelés pour nous raconter comment une jeune princesse allemande est devenue la très redoutée impératrice Catherine II de Russie. La Grande Catherine. The Great.

La Russie dans la peau

Cela ne se fera pas sans mal : déracinée de sa Prusse natale, biberonnée à la civilisation occidentale, éduquée, intelligente, éclairée par les scientifiques et les philosophes, la blonde enfant aux idéaux de liberté et d’amour romantique se retrouve plongée dans une Russie pour le moins rétrograde, mariée à un rustre psychopathe, Pierre qui n’a de tsar que le titre, se comporte plus comme un barbare égoïste et tyrannique que comme un souverain adulte et responsable.

Le couple va rapidement clasher, car la donzelle n’a aucune intention de se soumettre à son abruti d’époux, qu’elle domine largement en terme d’intellect et de sens politique. Très vite, elle ne souffre plus ses écarts, infidélités, colères, brutalités en tous genres … et elle envisage de lui piquer sa place. Mais pour y parvenir, il va falloir s’affirmer, ruser, manipuler, convaincre, rallier les sympathisants … et construire un projet réaliste pour développer cette Russie dont Catherine s’est éprise avec passion, au point de s’en faire tatouer les contours sur la cuisse.

https://youtu.be/7zF4MLUqnyQ

Papillons, parachute et tyrannie

C’est cette épopée que Tony McNamara nous raconte en 10 chapitres aux titres aussi déjantés que ce conte des milles et une folies où on bafre autant qu’on baise, on se bat, on décapite, on trucide, on cravache les serviteurs quand on ne les brûle pas vifs, on fait du lancer de parachute à chien, on dresse les papillons, on invite Voltaire et autres incongruités aussi absurdes que désopilantes. En apparence. Car cet univers chamarré cache une brutalité sans nom, une tyrannie abjecte, et des solitudes terribles. C’est sur ce terrain pour le moins accidenté que Catherine va faire ses classes de souveraine à poigne.

Et perdre pas mal de ses illusions tandis qu’elle gagne en diplomatie et en psychologie. Et en séduction, car elle plaît, le sait et en joue. Elle apprendra également que le pouvoir se paie au prix fort. Pour incarner cette princesse charmante, la rayonnante Elle Fanning joue à la fois de sa grâce naturelle et de son sens de la dérision, avec une maestria peu commune ; pour lui donner la réplique, Nicolas Hoult, imprévisible Pierre, déroutant de frustrations et de fragilité sous ses airs de monarque absolu devant qui tout doit plier. Autour une farandole de personnages hauts en couleur et pour le moins dingos.

Pulvériser les contes de fées

Le tout dans des décors et des costumes superbes, directement inspirés de ceux de Barry Lyndon, Marie Antoinette et La Favorite. Une magnificence qui met en relief l’incongruité loufoque de cet univers et les dérives de ce pouvoir aussi fantaisiste que destructeur. Clairement, le réalisateur prend des libertés avec l’Histoire, mas l’adaptation de sa pièce de théâtre n’en est que plus savoureuse et convaincante, drôle à souhait et particulièrement rafraîchissante. Comme si le period drama avait fusionné d’un coup avec un délire à la Happy pour engendrer une héroïne qui pulvérise avec délectation les codes du conte de fées. Bref, The Great se laisse voir avec un rare plaisir, et beaucoup d’enthousiasme.

La série tranche avec l’ensemble de la production actuelle, s’offre des clins d’œil à l’actualité, des jeux de mots trash et des protagonistes qui flirtent avec le punk et la riot attitude. Tout ça en perruque, robe à panier et escarpins d’époque. Du grand art, et une héroïne moderne qui devrait parler au cœur et à l’âme de jeunes spectatrices en quête d’icônes. Que cela ne vous empêche pas de lire la biographie de la Grande Catherine qui mérite le détour ; vous n’en apprécierez que mieux les libertés de cette nouvelle approche et sa pertinence.

Et plus si affinités

Pour visionner la saison 1 de la série The Great, consultez le site de Starzplay.

Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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