Le Système Ribadier : amoureuse crucruche et mari hypnotiseur

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« Décidément ma pauvre Angèle, tu les cumules ! Ton premier mari te cocufiait que c’en était une honte, et tu ne te doutais de rien bien sûr, crucruche ! Il meurt de ses fredaines, tu découvres le pot aux roses en lisant son carnet de souvenirs et bim ! tu ne trouves rien de mieux que d’épouser en secondes noces ce gros menteur de Ribadier, qui ne vaut guère mieux que ton premier époux ! Car celui –là n’a rien trouvé de mieux pour aller s’envoyer en l’air que de t’hypnotiser ! Non mais je vous jure ! Si c’est pas malheureux ! Alors qu’à côté de ça, tu as un brave petit gars, Thommereux, consul à Batavia quand même, c’est pas rien, qui revient ventre à terre de son exil pour demander ta main ! Mais ma pauvre petite, tu n’as jamais su y faire avec les hommes ! Jalouse, acariâtre, renfrognée, … une emmerdeuse ! »

Une jolie mécanique de mensonges et de frustrations

Voici en substance ce que la mère d’Angèle aurait pu lui dire, si Feydeau lui avait donné la parole. Mais le vaudevilliste a préféré laisser Angèle se débrouiller toute seule avec son manipulateur de mari et cet amoureux transi qui débarque de son Inde orientale, tout gaillard, pour tenter de la trousser vigoureusement. Pensez, la Angèle, elle lui fait bouillir le sang ! Bref c’est un petit bijou de pièce que Le Système Ribadier, où le mari, la femme, l’amant et le cocu se percutent frénétiquement dans le petit salon de ce couple bourgeois, dominé par le portrait du défunt volage et honni. Une jolie mécanique de mensonges et de frustrations comme seul Feydeau sait en inventer, avec ce sens si aigu de l’observation des perversités humaines.

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Comme dans un film muet

Jalousies, tromperies, mesquineries, bassesses, Angèle a beau faire, plus elle surveille son mari plus il s’échappe, et elle ne le retrouvera qu’en jouant elle-même les Messaline d’opérette. « Mais pour combien de temps ? » peut-on se demander … La situation est drolissime et mordante à la fois, car le dramaturge n’a pas pitié de cette bourgeoisie dont il dissèque la bêtise crasse. Et Zabou Breitman, ici aux commandes de la mise en scène, en remet une large couche en speedant ses interprètes comme dans un film muet, multipliant les mimiques de clowns, les gags et le comique de geste, comme pour accélérer encore le rythme frénétique de cette guerre des sexes. Il faut avouer qu’elle a de quoi faire, avec une Julie Sicard aigre et gamine à souhait, un Laurent Lafitte tout à fait à son aise en époux hypnotiseur.

Agréable et complètement burlesque

Ajoutons à ce couple détonnant Laurent Stocker, bondissant amant éconduit, Nicolas Lormeau dans le rôle du cocu de service, et la présence tutélaire de Martine Chevallier et Christian Blanc, gloires de la Comédie française, incarnant le couple de domestiques grivois et ironiques qui toujours chez Feydeau scrutent leurs patrons avec humour et une petite pointe de critique vinaigrée. Bref et pour faire court, tous les ingrédients sont ici rassemblés devant la caméra de Vitold Krysinsky pour vous faire passer un moment agréable et complètement burlesque, tout à fait dans la lignée des mises en scène produite par la Grande Maison, et qui s’avère moderne et farfelue sans tomber dans les innovations audacieuses qui trop souvent gâchent la légèreté typique du vaudeville.

Et plus si affinités

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Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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