La Briqueterie : l’Europe qui danse servie sur un Plateau

La Briqueterie, centre de développement chorégraphique basé à Vitry, est réputée pour sa biennale qui irrigue tout le Val-de-Marne d’une programmation chorégraphique toujours pétillante mais c’est aussi depuis un quart de siècle Les Plateaux, rendez-vous calé chaque année en septembre qui regorge de joyaux. Et l’édition 2017 largement ouverte sur l’Europe détonne. Présentation de la prog’.

25 ans déjà que Les Plateaux lance – fin septembre – la saison danse en Île-de-France. Au fil des ans, la plateforme est devenue un rendez-vous incontournable où les programmateurs viennent découvrir les tendances de la danse contemporaine européenne. Ces dernières années l’événement vitriot s’est ouvert au public, collaborant tour à tour avec la Maison des Arts de Créteil ou le Théâtre Jean-Vilar de Vitry.

Pour fêter ce premier quart de siècle d’existence, la plateforme propose une nouveauté plutôt bienvenue. Finies les petites formes, extraits, ou travaux en cours : cette année ce sont quinze pièces en intégralité qui se succèdent sur les trois jours que dure l’événement.

Comme l’année précédente, et sous l’égide de Daniel Favier (directeur) et Elisabetta Bissaro (en charge des relations internationales à La Briqueterie) la programmation mise sur l’Europe et au-delà. 7 pays sont à l’honneur : Belgique, Brésil, Canada, France, Pays Bas, Portugal et Tunisie. Autre chiffre : 2 créations mondiales, 3 premières françaises et 6 premières franciliennes. De quoi susciter bien plus que de l’intérêt.

Retour d’Avignon et rafales en vue

Deux pièces qui firent les beaux jours dans le In d’Avignon sont dévoilées pour la première fois en Île-de-France : We’re pretty fuckin far from okay de la Belge Lisbeth Gruwez (In 2016) et Face à la mer pour que les larmes deviennent des éclats de rires de Radhouane El Meddeb, artiste habitué des scènes de La Briqueterie.

Le chorégraphe tunisien jouera en ouverture de saison du Théâtre Jean-Vilar avec en première partie Rue de Volmir Cordeiro, dernier volet d’un triptyque entamé en 2015. Radhouane se confronte ici à la nouvelle réalité de son pays natal – état en effervescence depuis sa Révolution de 2010 – à ses artistes libres, aujourd’hui engagés politiquement et impliqués dans cette construction. Cette pièce, une première, tisse ainsi un lien entre l’histoire personnelle du chorégraphe et celle des artistes vivant aujourd’hui en Tunisie.

Autre temps fort : la création mondiale de Rafales de Benjamin Bertrand. Interprète repéré dans les pièces d’Olivier Dubois (les hits Tragédie et Auguri) ou dans la première création chorégraphique du plasticien Jean-Luc Verna (Uccello, Uccellacci & the Birds). En 2014 son Orages, solo autofictionnel où il explorait la question de l’origine à partir d’une donnée autobiographique (celle de sa naissance sous X) avait l’effet d’une bombe. Avec Rafales, il poursuit cette recherche autour de l’origine et de son mouvement ondulatoire, telle une rencontre entre le fluide dynamique du vent, des matières volatiles et un couple.

Des plateaux sous le signe du féminin

Parité quasi-absolue pour l’édition 2017 avec 7 artistes femmes (pour 8 hommes), et pas des moindres. L’an passé la géniale Oona Doherty avait été le choc des Plateaux dont certains spectateurs ne sont toujours pas revenus. Quelle artiste éblouira l’audience fin septembre ? La canadienne et féministe Daina Ashbee est déjà en lice avec Serpentine, succédané de sa jeune œuvre à la lisière de la danse et de la performance qui abordent avec intelligence des sujets complexes ou tabous comme la sexualité féminine, l’identité métisse et autochtone, et les changements climatiques (rien que ça !). À découvrir d’urgence également la suédoise Ingrid Berger Myhre (Blanks), Jessica Noita (Cabine d’essayage – Prix Beaumarchais-SACD / CCN de Créteil et du Val-de-Marne) ou encore Linda Hayford (Shapeshifiting), les deux dernières étant d’exceptionnelles interprètes hip-hop. Sans oublier Sylvie Pabiot qui présente sa nouvelle création Traversées, énième pièce qui dessine une troublante mappemonde des rapports humains.

Deux Boleros, du Twin Peaks et de l’Adorabilis

Les garçons ne sont pas en reste et il est d’ailleurs plus que recommandé de découvrir la pièce de Jonas&Lander, duo de trublions qui propose un délirant Adorabilis dont nous ne sommes pas sûrs d’avoir compris la note d’intention queer à souhait. Louis Barreau et Jésus Rubio Gamo proposent tous deux une variation de la scie musicale de Maurice Ravel : Bolero. Samuel Lefeuvre s’empare, lui, du mystique personnage de La Femme à la Bûche tirée de la génialissime série TV Twin Peaks de David Lynch.

Il y a aussi Satchie Noro, Jordi Galli … et le samedi soir, pour un final parfait de ce qui s’apparente à un mini-festival diablement bien pensé, Christian Ubl en MC d’un Folks Bal clôture les festivités. La danse vous est donc servie sur un plateau plaqué or à La Briqueterie.

Et plus si affinités

http://www.alabriqueterie.com/fr/les-plateaux/agenda.html

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Dieter Loquen

Posted by Dieter Loquen

Natif de Zurich, Dieter Loquen a pris racine à Paris il y a maintenant 20 ans. On le rencontre à proximité des théâtres et des musées. De la capitale, mais pas seulement. Il aime particulièrement l'émergence artistique. Et n'a rien contre les projets à haut potentiel queerness.