La Bataille de Solférino : une folle journée sur le fil du rasoir

24 juin 1859 : la bataille de Solférino fait rage, confrontant les troupes de Napoléon III aux armées autrichiennes. Ce fut l’une des plus meurtrières de la campagne d’Italie. Est-ce pour cette raison que Justine Triet tourne son long-métrage La Bataille de Solférino comme un film de guerre ? De prime abord, il ne s’agit que d’une crise de couple, Vincent venu profiter de son droit de visite le jour où son ex, Laetitia, couvre l’élection du nouveau président le 6 mai 2012 rue Solférino. Et bien sûr, ça dérape.

Suspens politique, suspens intime

Des personnages sous tension qui s’affrontent jusqu’au corps à corps au moment où une page politique se tourne : le suspens politique nourrit le suspens intime, et la réalisatrice joue des différents registres du rire, de l’angoisse et du chagrin pour nous perdre au milieu d’une cohue émotionnelle comme ses héros au cœur d’une foule compacte. Le projet est ambitieux, le sujet porteur, les profils riches de possibilités dans leurs oppositions. Justine Triet frappe donc fort pour ce premier film placé sous le signe du chaos

Étouffement et pression

Tourné en partie au cœur de la journée d’élection avec plusieurs caméras pour retranscrire la sensation d’étouffement et de pression, le long métrage s’en ressent, l’impact est terrible, amorcé déjà par une introduction éprouvante, où l’on voit Laetitia chez elle, en train de se préparer dans un désordre indescriptible, entre hurlements d’enfants, amant joyeux et déconnecté, maison bordélique et baby-sitter dépassé. L’arrivée de Vincent, artiste borderline et potentiellement brutal accroît la tension en apportant une dimension de perte de contrôle, de menace latente.

« Folle journée »

On retrouve à certains moments l’ambiance des premiers Klapisch avec Chacun cherche son chat, ce côté « folle journée » qui amène à s’interroger sur ce qui fait vraiment nos vies. On appréciera notamment la prestation de Vincent Macaigne dans le rôle de l’ex, toujours sur le fil du rasoir entre déchaînement total, exagération, mensonge, égoïsme et amour pour ses deux petites filles. Idem pour Laetitia Dosch qui retranscrit avec beaucoup de justesse la spirale des sentiments contradictoires qui secoue son personnage.

Débordement émotionnel

L’ensemble du casting donne à voir une tranche de vie incohérente, malsaine, mais où chacun d’entre nous peut se retrouver. Le regard de la réalisatrice est dérangeant, volontairement. Caméra plongeante, elle scrute le débordement émotionnel de ses protagonistes perdus dans la cohue ; pas de dialogues, à quoi servent-ils vu qu’ils n’arrivent pas à parler ni à s’entendre ? Mais c’est au sein du hurlement de la foule que leur désarroi s’inscrit sur leurs visages. Nous pourrions tous être Vincent ou Laetitia, adulescents qui se déchirent, incapables de tempérance dans ce monde moderne voué à la démence.

Et plus si affinités

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Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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