Exposition / Banditi dell’arte – Halle Saint Pierre – Paris : Parce que l’art est souffrance. Et espoir.

Van Gogh, Munch, Goya : le talent rend-il fou ? Ou bien est-ce la folie qui génère le talent ? Question posée en plein par l’art brut et la création dite « hors normes », qui s’épanouit en dehors des circuits habituels de diffusion de l’art.

Un sujet délicat qui explore les marges de la raison, cherchant sans fin ni solution à circonvenir cette étincelle infime mais définitive qui sépare l’intelligence la plus vive de la dégénérescence mentale la plus régressive, avec en filigrane cette question particulièrement douloureuse de l’enfantement intellectuel aux limites de l’être. Peu se sont spécialisés dans ce champ des possibles, ardu car méconnu et sujet à constantes polémiques. Les créations d’une personne atteinte de troubles mentaux, handicapée, schizophrène peuvent-elles être perçues et considérées comme des œuvres d’art ?

C’est ce domaine que la Halle Saint Pierre explore depuis maintenant plusieurs expositions centrées sur l’évocation de l’art brut pays par pays, culture par culture. On savait le lieu dédié à la pop culture et aux arts extrêmes. Après l’Angleterre et le Japon, l’équipe s’attaque à l’art brut italien. Banditi dell’arte : les bandits de l’art, les marginaux, les rebelles. En dehors du système ou enfermés par lui, à l’ombre des hautes murailles d’asiles ou de prisons qui les étioleraient complètement s’ils ne pouvaient s’exprimer/s’évader via une forme d’art qui leur coule des doigts et de la pensée comme un cri libératoire.

Précisons que cette forme d’expression suit l’histoire et l’évolution de la psychiatrie et de la justice. En Italie la loi n°36 de 1904 qui institue les premiers hôpitaux psychiatriques dénie aux fous toute existence légale, toute reconnaissance. Par la suite la culture italienne refusera d’admettre la valeur créative des œuvres que la Halle Saint Pierre expose pourtant en majesté.

Une première donc et un pas de plus dans une reconnaissance doublée d’un sentiment poignant devant certaines œuvres qui sont à la fois fruits d’une détresse profonde et explosion des portes cadenassées de l’esprit. Une reconnaissance difficile, parfois impossible : certaines créations exposées sont anonymes, leur paternité s’est perdue dans l’engrenage des ateliers d’expression, l’enfilade des cellules, le froid des dortoirs.

Plongé dans la pénombre, le rez-de-chaussée de l’expo se concentre sur les collections carcérales et psychiatriques du musée Lombroso, du musée d’anthropologie de Turin et de l’hôpital San Lazzaro de Reggio Emilia : des dessins, des broderies, des costumes faits de chiffons usagers, lavés et réduits en charpie, les meubles peints de Giovanni Podesta, Le Nouveau Monde de Francesco Toris, taillé avec minutie dans les ossements des plats qu’il venait d’avaler … A l’étage, en pleine lumière, des œuvres marginales, imposantes, dictées par le besoin irrépressible de recomposer le monde à sa façon, parfois à l’échelle de tout un jardin, une demeure complète et toute une vie durant : Melina Riccio, Giovanni Galli, Francesco Bellucci, …

L’ensemble est un challenge : le commissaire d’exposition Gustavo Giacosa a dû batailler ferme pour débusquer certains de ces « artistes » complètement retirés du monde et peu désireux de quitter la retraite cosmogonique qu’ils s’étaient façonnée. Cocon, berceau, tombeau ? Je n’en dirai pas plus : allez voir cette exposition, vous comprendrez alors que l’art n’et pas que vernissage, champagne, grands mécènes et prix glorieux ou cotation, il est surtout souffrance. Souffrance et espoir.

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Et plus si affinités

http://www.hallesaintpierre.org/

Delphine Neimon

Posted by Delphine Neimon

Fondatrice, directrice, rédactrice en chef et rédactrice sur le webmagazine The ARTchemists, Delphine Neimon est par ailleurs rédactrice professionnelle, consultante et formatrice en communication. Son dada : créer des blogs professionnels. Sur The ARTchemists, outre l'administratif et la gestion du quotidien, elle s'occupe de politique, de société, de théâtre.

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